Droit commercial

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Exercice du droit d’option par le bailleur : pas d’exigence formelle selon la Cour de cassation

Le 27 mars 2025, la troisième chambre civile de la Cour de cassation a rendu un arrêt significatif concernant l’exercice du droit d’option par le bailleur en matière de baux commerciaux (RG n° 23-20.030). Cette décision réaffirme les exigences formelles applicables à l’exercice de ce droit, en précisant que les mentions obligatoires prévues par l’article L. 145-9 du code de commerce ne concernent que le congé délivré par le bailleur, et non l’exercice de son droit d’option. Ainsi, le bailleur, lorsqu’il exerce son droit d’option, n’est pas tenu de respecter des conditions de forme particulières, ni d’inclure des mentions spécifiques telles que le délai de prescription pour contester cette décision ou une motivation explicite. Contexte de l’affaire Dans cette affaire, M. [O] était locataire de locaux commerciaux appartenant à la Société civile immobilière [P] (la bailleresse). Après avoir sollicité le renouvellement de son bail, la bailleresse a, dans un premier temps, proposé un nouveau loyer, puis a finalement exercé son droit d’option en refusant le renouvellement du bail. Le locataire a contesté cette décision en justice, invoquant notamment l’absence de certaines mentions obligatoires dans la notification du refus de renouvellement. Décision de la Cour de cassation La Cour de cassation a rejeté le pourvoi du locataire, confirmant ainsi la décision de la cour d’appel. Elle a jugé que les exigences formelles prévues par l’article L. 145-9 du code de commerce s’appliquent exclusivement au congé délivré par le bailleur, et non à l’exercice de son droit d’option. Par conséquent, le bailleur n’est pas tenu de respecter des conditions de forme spécifiques ni d’inclure des mentions particulières, telles que le délai de prescription pour contester la décision, ou encore de motiver sa décision, lorsqu’il exerce son droit d’option. Implications pratiques Pour les bailleurs comme pour leurs conseils, cette décision sécurise une pratique : le droit d’option peut être exercé librement, sans formalisme particulier, ce qui allège les contraintes procédurales pesant sur le bailleur. Côté preneur, en revanche, il est essentiel de rester vigilant : une lettre de refus de renouvellement, même succincte, peut être parfaitement valable si elle s’inscrit dans l’exercice du droit d’option du bailleur. In fine, cette décision confirme une lecture souple du droit d’option et participe à la stabilité attendue en matière de baux commerciaux. Elle illustre la volonté de la Cour de cassation de ne pas étendre artificiellement les exigences formelles prévues pour les congés à d’autres actes du bailleur, dans une logique de sécurité juridique.

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Agent commercial : Q&A

La qualité d’agent commercial correspond à un statut particulier qui soulève régulièrement de nombreuses questions. Tour d’horizon des questions les plus fréquentes : Qu’est-ce qu’un agent commercial ? Défini par le Code de commerce comme un mandataire indépendant chargé de manière permanente de négocier et éventuellement de conclure, au nom et pour le compte du mandant, des contrats de vente, d’achat, de location ou de prestation de services. Cette définition permet de dresser le portrait de l’agent commercial lequel est un professionnel dont la mission est de représenter un ou plusieurs mandants (entreprise, commerçant, etc.) de manière indépendante et donc hors du cadre d’un contrat de travail, ce qui exclut tout lien de subordination. L’agent commercial peut-il avoir des employés ou déléguer sa mission ? L’agent commercial est un professionnel indépendant et, en tant que tel, demeure libre de son organisation. Il peut, par exemple, recruter du personnel salarié ou mandater lui-même des sous-agents commerciaux. Attention toutefois, certains contrats d’agence incluent une clause « intuitu personae » qui oblige le mandataire à agir en personne. En tout état de cause, il faut garder à l’esprit que l’agent reste seul responsable à l’égard du mandant de l’action de ses salariés et sous-agents. Quelles formalités faut-il remplir pour devenir agent commercial ? Avant de commencer son activité, l’agent commercial a l’obligation de s’immatriculer au Registre Spécial des Agents Commerciaux (RSAC). Par ailleurs une fois l’immatriculation réalisée, l’agent commercial demeure soumis à une obligation de déclaration s’agissant de tout fait de nature à modifier les mentions figurant dans ladite immatriculation. Existe-t-il des incompatibilités professionnelles avec la qualité d’agent commercial ? Plusieurs professions sont exclues de la qualité d’agent commercial, on retrouve ainsi les agents de voyage, les mandataires de l’assurance, les intermédiaires en opération de banque et conseillers en investissement financiers, etc. Sous quelle forme exercer l’activité d’agent commercial ? L’agent commercial peut être une personne physique entrepreneur individuel ou micro entrepreneur s’il respecte les conditions de ce statut, ou encore une société. Il convient de noter qu’exercer son activité en tant que personne physique permet à l’agent commercial ou ses ayants droit d’obtenir, en cas de cessation de contrat due à l’âge, l’infirmité, la maladie ou le décès de l’agent commercial, une indemnité de cessation de contrat. Quelles solutions pour protéger mon patrimoine si je choisis d’exercer en tant qu’entrepreneur individuel ? Il existe plusieurs solutions afin de protéger son patrimoine. D’une part, tout entrepreneur individuel a la possibilité de déclarer insaisissables ses biens fonciers non affectés à son activité professionnelle. D’autre part, depuis le 1er janvier 2011 la loi a créé le statut d’entrepreneur individuel à responsabilité limitée (EIRL) qui permet de constituer un patrimoine professionnel séparé du patrimoine personnel, les créanciers professionnels ne pouvant saisir que le patrimoine professionnel.

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Dol du mandataire et responsabilité civile, attention à la faute du mandant

La Cour de cassation a eu à trancher la question de savoir si la responsabilité civile du mandant était engagée du fait des manœuvres dolosives de son mandataire. Après avoir rappelé que la victime d’un dol est fondée à agir, au choix, en nullité de la convention sur le fondement des articles 1137 et 1178 du Code civil ou en réparation du préjudice sur le fondement des articles 1240 et 1241 du code civil, la Cour précise que : « Si le mandant est, en vertu de l’article 1998 du code civil, contractuellement responsable des dommages subis du fait de l’inexécution des engagements contractés par son mandataire dans les limites du mandat conféré, les manœuvres dolosives du mandataire, dans l’exercice de son mandat, n’engagent la responsabilité du mandant que s’il a personnellement commis une faute, qu’il incombe à la victime d’établir. » En l’espèce, les victimes du dol avaient renoncé à solliciter la nullité de l’acte litigieux pour limiter leur demande à des dommages-intérêts. La Cour de cassation prend position et refuse d’engager la responsabilité du mandant en l’absence de toute faute personnelle de ce dernier. La présente décision se comprend au regard de la nature même du dol, lequel présente deux aspects distincts et complémentaires : d’un côté, le dol apparaît comme un vice du consentement ; d’un autre côté, le dol apparaît comme un délit civil. Or, aux termes de l’article 1138 du Code civil, le dol est constitué s’il émane du représentant, gérant d’affaires, préposé ou porte-fort du contractant ou encore lorsqu’il émane d’un tiers de connivence. Ainsi, la question posée par le pourvoi revient à se demander si admettre la nullité d’un contrat sur le fondement du dol commis par le représentant du contractant implique nécessairement d’admettre la responsabilité civile du mandant du fait des manœuvres dolosives du mandataire ? Ou, au contraire, faut-il, pour que le mandant soit condamné à des dommages-intérêts envers le cocontractant, qu’il ait lui-même commis une faute, ou à tout le moins l’un des faits générateurs de responsabilité civile prévus par les articles 1382, devenu 1240, et suivants du code civil ? La Cour de cassation tranche cette question et répond par l’affirmative : la responsabilité civile du mandant ne peut être engagée que s’il a personnellement commis une faute. Il semble donc qu’il faille désormais distinguer en fonction de la demande formulée par la victime du dol : – Si cette dernière sollicite la nullité : l’article 1138 du code civil s’applique et les seules manœuvres dolosives du mandataire suffisent à emporter la nullité, – Si cette dernière sollicite la réparation de son préjudice : en application des articles 1240 et 1241 du Code civil, la faute personnelle du mandant doit être caractérisée pour engager sa responsabilité civile.